Strasbourg, le 23 octobre 2008

 

Avis n° 484 / 2008

CDL-AD(2008)022

Or. angl.

                                                             

 

COMMISSION EUROPÉENNE POUR LA DÉMOCRATIE PAR LE DROIT

(COMMISSION DE VENISE)

 

 

 

AVIS CONJOINT

SUR LE CODE ÉLECTORAL

DE LA MOLDOVA

en vigueur le 10 avril 2008

 

 

Adopté par par la Commission de Venise

lors de sa 76e session plénière

(Venise, 17-18 octobre 2008)

 

 

sur la base des observations de

M. Srdjan DARMANOVIC (membre, Commission de Venise)

M. Kåre VOLLAN (expert, Commission de Venise)

M. Tigran KARAPETYAN (expert, OSCE/BIDDH)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Ce  document ne sera pas distribué en réunion. Prière de vous  munir de cet exemplaire.

www.venice.coe.int


 

 

TABLE DES MATIÈRES

 

 

 

 

 

 

I.      Introduction. 3

Mandat 3

Documents de référence. 3

Remarques d’ordre général 4

II.     Amendements d’avril 2008. 5

III.    Système électoral du Parlement 5

Système électoral 5

Augmentation du seuil d’attribution des sièges. 5

Suppression des alliances préélectorales. 6

IV.        Candidature et droit de vote. 6

Droit de vote. 6

Éligibilité. 7

V.         L’administration électorale. 9

VI.        Listes électorales. 9

VII.       Désignation, enregistrement et exclusion des candidats. 10

VIII.      Campagne électorale. 12

Activités de campagne. 12

Campagne et médias. 13

IX.        Vote et décompte des voix. 13

Sécurité et secret du scrutin. 13

Suspension du scrutin. 13

Identification des électeurs. 14

Sécurité de la procédure de vote avec urne mobile. 14

Clôture du scrutin. 14

Décompte et recomptage des voix. 14

Publication des résultats. 15

Observateurs. 15

X.         Exigences en matière de participation / Seuils de participation des électeurs. 15

XI.        Procédures de recours. 16

XII.       Sanctions. 17

XIII.      Autres questions. 17

Conclusions. 18

 

 

 

 

 


I.          Introduction

 

Mandat

 

1.  En avril 2008, le Parlement de la République de Moldova a adopté des amendements au code électoral national. A la suite d’une requête officielle des autorités de la Moldova transmise à la Commission de Venise le 28 août, et en ligne avec leur collaboration habituelle, le BIDDH de l’OSCE et la Commission de Venise ont élaboré une étude conjointe d’experts sur le code électoral de la Moldova (ci-après « le code »).

 

2.  Le présent avis devrait être lu à la lumière de l’avis conjoint de la Commission de Venise et du BIDDH de l’OSCE adopté par la Commission de Venise à sa 73e réunion plénière en décembre 2007[1]. Il s’interroge sur la mesure dans laquelle les amendements ont donné suite aux recommandations qui avaient été formulées et évalue les amendements par rapport aux engagements de l’OSCE et aux normes internationales en matière d’élections démocratiques.

 

3.  La présente étude a été établie sur la base d’une traduction anglaise du code électoral fournie par le Parlement de Moldova[2] sans qu’il ait été possible de consulter l’original. Par conséquent, il ne garantit pas l’exactitude de la traduction examinée, ni la numérotation des articles, paragraphes et alinéas. Toute étude juridique fondée sur des textes de loi traduits peut être affectée par des questions d’interprétation résultant de la traduction.

 

4.  Le présent avis a été adopté par la Commission de Venise à sa 76e session plénière (Venise, 17-18 octobre 2008).

Documents de référence

 

5.  L’Avis conjoint s’appuie sur :

- le code électoral (Loi No 1381-XIII du 21 novembre 1997, dans la version en vigueur le 10 April 2008 tel que fourni par le Parlement de Moldova; CDL(2008)082 ; ci-après « le code ») ;

- la Constitution de la République de Moldova dans la version en vigueur le 29 juillet 1994 avec les derniers amendements du 25 juillet 2003 ;

- l’Avis conjoint sur le code électoral de la Moldova adopté à la 73e session plénière de la Commission de Venise (Venise, 14-15 décembre 2007, CDL-AD(2007)040 ; ci-après « le dernier avis conjoint ») ;

- l’Avis conjoint sur le code électoral de Moldova, tel qu’amendé le 22 juillet et les 4 et 17 novembre 2005 adopté par la Commission de Venise lors de sa 66e session plénière (Venise, 20 mars 2006, CDL-AD(2006)001) ;

- le Code de bonne conduite en matière électorale : Lignes directrices et rapport explicatif – adoptés par la Commission de Venise à sa 52e session (Venise, 18-19 octobre 2002, CDL-AD(2002)023rév) ;

- la Déclaration interprétative sur la stabilité du droit électoral adoptée par le Conseil des élections démocratiques lors de sa 15e réunion (Venise, 15 décembre 2005) et la Commission de Venise à sa 65e session plénière (Venise, 16-17 décembre 2005, CDL-AD(2005)043;

- le Rapport de la Commission pour le respect des obligations et engagements de la Moldova par les États membres du Conseil de l’Europe (Commission de suivi), Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, Respect des obligations et engagements de la Moldova (doc. 11374, 14 septembre 2007 ; Co-rapporteurs : Mme Josette DURRIEU (Groupe socialiste, France) et M. Egidijus VAREIKIS (Groupe du parti populaire européen, Lituanie).

Remarques d’ordre général

 

6.  Le code électoral régit toutes les élections directes et les référendums de la République de Moldova, à l’exception des élections des autorités de l’unité territoriale autonome de Gagaouzie. L’Avis conjoint de 2007[3] a conclu que « Suite aux recommandations du dernier Avis conjoint sur le Code électoral de la Moldova[4], le Parlement moldave a pris un nombre considérable d’initiatives pour améliorer la législation électorale. Le Code électoral, tel qu’amendé jusqu’au mois de mars 2007, offre un excellent socle pour l’organisation d’élections véritablement démocratiques, bien que certaines recommandations formulées par la Commission de Venise et le BIDDH de l’OSCE ne transparaissent pas dans la version révisée du texte. Le déroulement d’élections authentiquement démocratiques dépend donc essentiellement de la volonté politique de l’ensemble des parties prenantes et de l’application, de bonne foi, de la législation électorale ».

 

7.  Voici un résumé des principales recommandations soulignées dans le dernier avis conjoint qui ont été partiellement mises en œuvre, ou qui ne l’ont pas du tout été dans la version du code électoral en vigueur le 10 avril 2008.

 

8.  Recommandations partiellement mises en œuvre :

- aligner sur la jurisprudence récente de la CEDH la disposition relative à la privation de l’exercice de leur droit de vote, par les détenus purgeant une peine à laquelle ils ont été condamnés par décision de justice ;

- respecter le principe de la présomption d’innocence  dans les procédures engagées en cas d’infraction à la législation susceptibles de conduire à la révocation d’un candidat ;

-  mieux assurer le secret du scrutin en supprimant l’obligation d’apposer un tampon sur les bulletins de vote, une fois ceux-ci remplis par les électeurs ;

-  mettre en place des mécanismes supplémentaires de contrôle du dépouillement ;

-  préciser la compétence des commissions électorales et des tribunaux en matière d’invalidation des résultats du scrutin ;

-  améliorer la fiabilité des listes électorales, notamment en mettant en place un registre électoral centralisé et permanent.

 

9.  Recommandations qui n’ont pas été mises en œuvre :

- permettre une participation adéquate dans les organes élus et à la vie publique des minorités nationales et des principales parties prenantes à l’échelon régional ;

- supprimer les seuils obligatoires de participation électorale pour que les élections soient reconnues valides, afin d’éviter des cycles sans fin d’élections invalidées ;

-  ne pas relever les seuils fixés pour l’attribution des sièges ;

-  revoir la possibilité de révoquer les membres des commissions électorales, dans la mesure où elle risque de porter atteinte à l’indépendance et à la stabilité de l’administration électorale ;

-  obliger la Commission électorale centrale à publier les résultats détaillés des élections par bureau de vote sur son site internet, dès leur communication par les commissions électorales de district ;

-  préciser le pouvoir de décision des membres de la Commission électorale centrale ayant une voix délibérative et consultative ;

-  prévoir des garanties suffisantes pour prévenir tout vote multiple éventuel en cas de maintien de l’inscription le jour du scrutin ;

-  poursuivre l’harmonisation des procédures de collecte et de vérification des signatures, pour faire en sorte que ces procédures n’empêchent pas l’inscription globale des candidats ;

-  réexaminer les restrictions imposées au droit de faire campagne afin de ne pas empêcher les précampagnes électorales et de ne pas porter atteinte aux principes généraux de la liberté de parole et d’expression ;

-  définir clairement les attributions et les responsabilités des diverses instances chargées d’examiner les recours, en vue d’éviter les conflits de compétence ;

-  ne pas donner aux requérants le droit de choisir leur instance de recours.

 

II.         Amendements d’avril 2008

 

10.  Les amendements introduits cette année sont incomplets. Dans l’ensemble, ils n’ont pas donné suite à la plupart des recommandations. Si certains apportent des améliorations techniques à l’organisation du processus électoral, il est regrettable que d’autres, comme les restrictions au droit de se porter candidat, constituent un recul. Dans l’ensemble, les amendements ont appliqué les recommandations du BIDDH de l’OSCE et de la Commission de Venise de façon limitée.

 

11.  Les amendements ont trait aux points suivants :

  la suppression des alliances préélectorales (coalitions) ;

  la modification du seuil pour l’attribution de sièges au parlement ;

  les restrictions au droit de se porter candidat ;

  la désignation des candidats ;

  les restrictions au droit de vote ;

  les membres de la Commission électorale centrale ;

  le scrutin ;

  l’identité des électeurs ;

  le dépouillement des voix ;

  les procédures de recours.

 

III.        Système électoral du Parlement

Système électoral

 

12.  Dans leur dernier avis conjoint et dans d’autres avis, la Commission de Venise et le BIDDH de l’OSCE ont souligné l’importance de tenir compte, dans les décisions relatives au système électoral, des minorités qui représentent une proportion non négligeable de la population de la République de Moldova. Il a été recommandé que « le système électoral du Parlement permette une participation suffisante à la vie publique des minorités nationales et des principales parties prenantes à l’échelon régional »[5].

 

13.  Les amendements n’ont apporté aucun changement au système en place pour les élections législatives. Les auteurs de la présente analyse notent que les précédentes recommandations de la Commission de Venise et du BIDDH de l’OSCE concernant le système électoral demeurent pertinentes et devraient être prises en considération.

Augmentation du seuil d’attribution des sièges

 

14.  Le seuil applicable à l’attribution des sièges au parlement a été modifié à plusieurs reprises. En 2005, notamment sur recommandation de la Commission de Venise et du BIDDH, il a été ramené de 6 à 4 % pour les partis et de 9-12 à 8 % pour les coalitions. Le BIDDH de l’OSCE et la Commission de Venise ont considéré la réduction du seuil comme un progrès et ont conseillé expressément dans leur dernier avis conjoint que « les autorités ne reviennent en aucun cas sur cette diminution bienvenue et s’en tiennent, pour les partis politiques, au seuil qui leur est applicable ». Ils ont noté aussi qu’« Il y a lieu de penser que les coalitions devraient être encouragées, afin de favoriser une plus grande coopération entre les partis et la stabilité du gouvernement »[6].

 

15.  Les amendements d’avril 2008 ont pourtant porté le seuil de participation pour l’attribution des sièges de 4 à 6 % des votes valables dans l’ensemble du pays (article 86(2)). Le nouveau seuil de 6 % est anormalement élevé (bien que l’on trouve des seuils plus élevés encore d’autres pays). Un seuil aussi élevé risque de d’entraîner le gaspillage de nombreuses voix[7]. Il est fortement recommandé, notamment dans les nouvelles démocraties, de maintenir un seuil inférieur.

Suppression des alliances préélectorales

 

16.  Plusieurs articles ont été modifiés pour que les partis ne puissent plus former une alliance ou une coalition préélectorale. Ces alliances étaient formées uniquement à des fins électorales ; les partis formant les coalitions soumettaient une liste commune de candidats pour les élections législatives ou locales. Cette possibilité est souvent accordée lorsque de nombreux petits partis se présentent dans les circonscriptions n’ayant que quelques sièges et où le seuil pour le premier candidat est élevé. En Moldova, les électeurs votent pour des députés à l’échelon national dans le cadre des élections législatives, et à l’échelon des districts, municipalités ou villages dans le cadre des élections locales. De plus, le seuil d’attribution des sièges était auparavant plus élevé pour les coalitions que pour les partis. La nécessité de former des alliances est donc moindre que dans les pays où les circonscriptions sont plus petites.

 

17.  Néanmoins, conjuguée à l’augmentation du seuil de représentation parlementaire, la suppression de la possibilité pour les partis politiques et les organisations sociopolitiques de se présenter en coalitions risque d’accroître encore le nombre de voix perdues dans les élections législatives.

 

18.  Il est donc recommandé de ramener le seuil de participation dans l’attribution de sièges à son niveau précédent de 4 %.

 

IV.        Candidature et droit de vote

Droit de vote

 

19.  Dans leur dernier avis conjoint, le BIDDH de l’OSCE et la Commission de Venise ont noté que selon la Cour européenne des Droits de l’Homme, « les restrictions au droit de vote affectant tous les détenus condamnés de manière générale, automatique et indifférenciée sont incompatibles avec l’article 3 du Protocole n° 1 (droit à des élections libres) à la Convention de Sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales »[8].

 

20.  Un amendement à l’article 13(1)c du code électoral limite la restriction à un plus petit groupe de « personnes condamnées à la privation de liberté par un jugement final du tribunal pour crimes graves, très graves et d’une exceptionnelle gravité »[9]. Cet amendement constitue une amélioration, même s’il manque de précision. Il n’apparaît pas non plus clairement si le paragraphe inclut aussi les personnes qui ont entièrement purgé leur peine. Si c’est le cas, il serait beaucoup trop sévère. Le code devrait préciser que seules les décisions de justice explicites peuvent priver du droit de vote et que ces décisions ne devraient être prises que dans des situations extrêmement difficiles[10].

 

21.  Il faut noter que, d’après le code pénal de la République de la Moldova, tout crime conduisant à une peine d’emprisonnement de plus de cinq ans est considéré comme grave. Par conséquent, il serait peut-être souhaitable d’examiner plus avant cet article ainsi que les dispositions pertinentes du code pénal pour préciser les cas dans lesquels le tribunal prend une décision de privation du droit de vote, proportionnée à l’infraction commise et allant dans le sens du but énoncé à l’article 61(2) du code pénal, à savoir « rétablir la justice sociale, de punir les auteurs de crimes et d’empêcher que de nouveaux crimes ne soient commis ».

 

22.  Comme déjà mentionné dans les précédents avis conjoints, selon l’article 123(1), le personnel militaire en conscription n’est pas autorisé à voter aux élections locales. Cette question n’a pas été abordée par les amendements, qui n’inscrivent pas non plus dans la loi le principe général d’accessibilité des bureaux de vote, tel que recommandé pour établir des garanties minimales pour les électeurs âgés et/ou handicapés.

Éligibilité

 

23. L’article 13(2) liste les catégories de personnes qui « ne devraient pas être élues ». Une telle expression est ambiguë. Cela devrait-il être entendu comme une liste de restrictions au droit de porter sa candidature ou comme une liste de restrictions au droit de prendre un mandat ? En d’autres termes, l’article 13(2) concerne-t-il l’inéligibilité ou l’incompatibilité ? Dans le premier cas, l’article 13(2) fournirait des éléments pour rejeter une candidature avant les élections ; dans le dernier cas, les restrictions ne s’appliqueraient théoriquement qu’au moment de la prise de mandat.

 

24. En réalité, l’article 13(2) mélange deux situations. Certaines restrictions semblent clairement concerner le droit de se porter candidat, en particulier: les restrictions s’appliquant aux personnes qui n’ont pas le droit de vote [13(2)b], aux personnes « accusées privées de liberté par un jugement final d’une cour et dont le casier judiciaire fait toujours mention » [13(2)c], et aux personnes « dépourvues du droit d’occuper des fonctions de responsabilité par un jugement final d’une cour » [13(2)d]. C’est moins clair pour les deux autres restrictions, qui pourraient être interprétées comme des incompatibilités, bien que cela ne soit pas clairement indiqué comme tel : « militaires en service » [13(2)a] et « personnes qui détiennent à la fois la nationalité de la République de Moldova et une autre nationalité pour une fonction de député dans les conditions de l’article 75 » [13(2)b¹].

 

25. Pour une question de clarté, il est recommandé d’éviter d’utiliser l’expression « droit d’être élu » et de favoriser plutôt l’expression, plus claire, « droit de se porter candidat ». Il est également recommandé de prévoir une disposition séparée régulant les incompatibilités.

 

26. Au-delà de l’ambigüité précédemment mentionnée, les restrictions stipulées par l’article 13(2) méritent une attention plus développée.

 

27.  Un amendement à l’article 13(2)c exclut les personnes « condamnées à la privation de liberté par décision finale de justice effectuant leur peine dans des centres de détention ou qui ont un casier judiciaire pour avoir commis des crimes graves, très graves ou d’une exceptionnelle gravité ». De plus, l’ajout à l’article 13(2)d refuse la capacité civique passive « aux personnes privées du droit d’occuper des fonctions à responsabilité par décision finale de justice ». Il semble y avoir une répétition inutile puisque les restrictions au droit de vote s’appliquent automatiquement à l’éligibilité en vertu de l’article 13(2)b.

 

28.  La restriction apportée par les amendements à l’article 13(2)c paraît excessive. En effet, l’article 13(2)d prévoit déjà le refus de la capacité civique passive « aux personnes qui ont été privées du droit d’occuper des fonctions à responsabilité par décision finale de justice » et reconnaît par conséquent aux juridictions le pouvoir d’utiliser comme forme de sanction la privation du droit d’occuper un poste dans la fonction publique. Il est conseillé de revoir plus avant la disposition de l’article 13(2)c et les dispositions pertinentes du code pénal concernant les cas spéciaux pour lesquels une juridiction peut priver une personne du droit d’être élue, si cette sanction est appropriée au crime commis et tend vers le but énoncé à l’article 61(2) du code pénal de « rétablir la justice sociale, de punir les auteurs de crimes et d’empêcher que de nouveaux crimes ne soient commis ».

 

29.  D’une manière générale, toute limitation de l’éligibilité allant au-delà de celles qui découlent des restrictions à la capacité civique active apparaît contraire à la disposition de l’article 38-3 de la Constitution moldave selon laquelle « Le droit de se présenter aux élections doit être garanti, en vertu de la loi, à tous les citoyens de la République de la Moldova détenteurs du droit de vote ».

 

30.  Un nouveau paragraphe à l’article 13(2) refuse le droit « d’être élu » lors des élections parlementaires « aux personnes qui ont en plus de la nationalité de la République de Moldova d’autres nationalités pour occuper une fonction de député selon les conditions de l’article 75 ». Or l’article 75(3) dispose qu’une personne peut avoir plusieurs nationalités et présenter sa candidature, à condition de renoncer au moment de l’élection à ses nationalités autres que la nationalité moldave. Cela doit être considéré comme une incompatibilité.

 

31.  Au-delà de la simple question d’incohérence, la nationalité multiple ne devrait pas figurer parmi les restrictions au droit de se présenter aux élections. Le Code de bonne conduite en matière électorale cite[11] la Convention européenne sur la nationalité, ratifiée par la Moldova en novembre 1999, qui dispose sans ambiguïté que « les ressortissants d’un État partie détenteur d’une autre nationalité devraient avoir, sur le territoire de l’État partie dans lequel ils résident les mêmes droits et devoirs que les autres ressortissants de cet État partie »[12].

 

32.  Qui plus est, cette limitation pourrait constituer une violation de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, à savoir de l’article 3 du Premier Protocole[13] et de l’article 14 de la Convention[14].

 

33. Un amendement à l’article 13(3) indique quelle catégorie d’officiels « cesseront leur activité dans la fonction qu’ils occupent, une fois acquis l’enregistrement de leur candidature ». Cette précision est bienvenue.

 

34.  L’article 13(3) est modifié de sorte à indiquer exactement quelles fonctions sont incompatibles avec la présentation d’une candidature aux élections. C’est une bonne chose, car l’ancienne disposition était plutôt générale.

 

V.         L’administration électorale

 

35.  Les préoccupations exprimées dans le dernier avis conjoint quant à l’absence dans le code de dispositions précisant les droits et compétences des représentants des candidats désignés auprès des instances électorales au sein desquelles ils disposent d’un droit de vote consultatif restent d’actualité.

 

36.  Les amendements ont modifié l’article 17(6) afin de supprimer la limite du nombre de mandats des membres de la CEC.

 

37.  Les amendements à l’article 18(2) et l’insertion de l’article 18(21) du code apportent des clarifications sur les processus décisionnels de la CEC et sur l’ordre de soumission d’avis spéciaux pour les membres du CEC exprimant une opinion dissidente. Ce sont des développements positifs.

 

38.  Les amendements aux articles 19(1) et 20(2)b ont ajouté de nouvelles exigences pour être membre de la CEC : à avoir dix années d’expérience dans l’administration judiciaire ou publique et avoir exclusivement la nationalité moldave. La justification de cette dernière exigence est peu claire. Si la législation moldave accepte les nationalités multiples en général, elle ne devrait pas considérer les personnes concernées comme des citoyens de second rang en limitant leurs droits[15].

 

39.  L’article 32 a été modifié de sorte à confier la responsabilité matérielle de « conserver et de retourner les biens reçus de la Commission électorale centrale » aux présidents des conseils et bureaux électoraux.

 

40.  Les amendements n’ont pas répondu à la crainte suscitée par le pouvoir que confère l’article 33 à l’institution qui a nommé ou désigné un membre d’une commission électorale ou d’un bureau électoral de démettre ce membre de ses fonctions.

 

41.  Les amendements n’ont pas donné suite à la recommandation du dernier avis conjoint d’insérer « les dispositions nécessaires, qui assureront [aux partis représentés au Parlement] une représentation minimale au sein de ces commissions »[16], ni à la recommandation du BIDDH de l’OSCE « d’envisager, dans ce cadre, la formation de commissions permettant la participation de partis plus implantés dans certaines régions du pays que les partis représentés au Parlement »[17].

 

VI.        Listes électorales

 

42.  Le 15 mai 2008, le Parlement moldave a adopté une loi sur le concept de système d’Etat d’information automatisé relatif aux élections, qui charge la Commission électorale centrale de développer et d’introduire un système électronique facilitant la préparation, la conduite et la réconciliation des résultats électoraux. Ledit concept propose entre autres la création d’un registre électronique centralisé des électeurs permettant en vue d’éliminer les listes électorales sur papier et d’exclure ainsi les risques de vote multiple[18].

 

43.  La mise en œuvre de cette nouvelle loi pourrait répondre à un certain nombre de problèmes soulevés dans le précédent avis conjoint[19]. Restent d’actualité les recommandations faites dans l’avis conjoint de mars 2006[20] visant à assurer la publicité du registre des électeurs et l’accès des électeurs à la base de données du registre, à permettre une période de vérification suffisante de même que l’existence de mécanismes correctifs.

 

VII.       Désignation, enregistrement et exclusion des candidats

 

Désignation

 

44.  Un amendement à l’article 13(2)c exclut d’un tel mode de désignation les « personnes condamnées à la privation de liberté ». Un amendement ajouté à l’article 41 stipule que les partis contestant les élections « peuvent nommer comme candidats des membres de leur parti, ainsi que des personnes qui n’appartiennent à aucun parti ». Cette disposition doit être lue à la lumière de l’interdiction, introduite par les amendements, de former des alliances et coalitions préélectorales, puisque sa justification semble être d’éviter que des partis politiques n’établissent de fait des coalitions préélectorales. Alors que cette disposition est clairement pertinente avec l’interdiction des coalitions pré-électorales, de telles restrictions à la liberté des partis de choisir des candidats sur leurs listes devraient être évitées, même s’il s’agit de membres d’autres partis. Cela permettrait à un parti de ne pas participer à une élection afin de soutenir une autre liste, un changement qui devrait être permis en particulier quand les coalitions pré-électorales ne sont pas autorisées. Si une personne fait campagne contre sa propre liste, il devrait alors être laissé à l’appréciation du parti de prendre des mesures. Par principe, les candidats devraient pouvoir composer leurs listes comme bon leur semble.

 

45. L’article 44 s’est vu ajouté une disposition 31 qui stipule qu’une « personne peut aspirer à plus d’un mandat électoral mais pour un parti uniquement ». On comprend que cette nouvelle disposition a été écrite en vue de ne contenir cette limitation qu’aux élections qui se tiennent en même temps. Ceci pourrait être stipulé explicitement, de même qu’il serait stipulé qu’un candidat portant candidature à titre indépendant le puisse même lorsqu’il est candidat au titre d’un parti dans une autre élection.

 

Enregistrement

 

46.  Les insuffisances des articles 42 et 43, qui réglementent la collecte de signatures de soutien aux candidats indépendants, signalées dans le dernier avis conjoint n’ont toujours pas été corrigées[21].

 

47.  Les amendements à l’article 44 précisant une date de début pour la soumission des dossiers d’inscription et fixant un délai minimum entre « la décision concernant le lieu et le moment de la réception des dossiers, et le moment où ces dossiers sont effectivement reçus » sont positifs. Toutefois, le code demeure peu clair au sujet des procédures de vérification des documents présentés par les candidats en vue de leur inscription et des mesures prises si l’on constate que certaines des informations transmises sont inexactes.

 

48.  Un amendement à l’article 48(3) modifie légèrement le processus de décision concernant l’ordre des candidats sur le bulletin de vote. Il semble que cet ordre soit encore déterminé par la date de dépôt de la candidature, mais pour les candidatures déposées le même jour, l’ordre au sein du groupe est établi par tirage au sort. L’ajout à l’article 44(2) précise qu’il faut un délai d’au moins 24 heures entre l’annonce de la date et du lieu de réception des candidatures et le début de leur dépôt. Cette disposition, avec les tirages au sort, semble établir équitablement l’ordre d’apparition sur les bulletins de vote : les partis se voient offrir les mêmes chances de figurer en bonne place sur les bulletins.

 

49.  Il est recommandé de fixer l’ordre d’apparition des candidats sur les bulletins de vote par tirages au sort effectués en toute ouverture et transparence, seulement après l’inscription de tous les candidats et de préférence en présence de leurs représentants et des représentants des médias.

 

50.  Un amendement à l’article 134 a précisé l’ordre d’apparition sur les bulletins de vote pour les deux candidats restants au deuxième tour éventuel des élections municipales.

 

Exclusion

 

51.  Une nouvelle disposition 61 à l’article 46 énonce : « La demande d’exclure un candidat de la liste des candidats aux élections dans le délai stipulé au paragraphe 6 doit être examinée par l’organe compétent du parti dans les trois jours ». La lecture de cette disposition n’est pas aisée. En particulier, on comprend que c’est à l’organe compétent du parti que la demande d’exclusion est soumise par le candidat ; il serait cependant utile de le stipuler explicitement. En outre, les étapes suivantes de la procédure, après que les organes du parti aient examiné la demande d’exclusion, ne sont pas indiquées, en particulier les modalités de notification de l’entité chargée de l’enregistrement des candidats.

 

52.  Tel que mentionné des les avis conjoint précédents, des amendements à plusieurs articles du code ont permis une amélioration de la question de l’exclusion de candidats pour cause de violation du code électoral. Lesdits amendements ont introduits la condition d’avoir « un jugement final d’un cour » pour la mise en œuvre de l’annulation de l’enregistrement.

 

53.  Les trois nouvelles dispositions ci- après ont été ajoutées à l’article 69 :

« 2. Pour la violation du présent Code, la Commission électorale centrale peut appliquer ou demander que soient appliquées aux candidats les sanctions ci-après :

a) avertissement ;

b) annulation de l’inscription ;

3. L’avertissement est appliqué sur décision de la Commission électorale centrale, et l’annulation de l’inscription sur décision judiciaire finale.

4. L’avertissement s’applique à la violation du présent code, à l’exception des articles 70 et 71 ».

 

54.  Les amendements aux articles 26, 93 et 138 du code reflètent le principe et fournissent quelque clarification quant à la mise en œuvre de l’annulation de l’enregistrement d’un candidat et l’absence d’enregistrement d’un candidat. L’introduction d’une procédure juridictionnelle pour l’annulation d’enregistrement est un développement bienvenu, dans la mesure où il pourrait fournir au défendeur des garanties procédurales adéquates ; cependant, certaines préoccupations exprimées dans les avis conjoints précédents restent d’actualité.

 

55. Les recommandations conjointes soulignent la nécessité que chaque démarche puisse permettre de mener à une sanction qui se conforme au principe de la présomption d’innocence. Le code devrait aussi stipuler que de telles décisions ne devraient pas conduire à l’annulation du mandat d’un candidat élu. Ces recommandations sont réitérées.

 

56. En outre, la formulation actuelle du code implique que chaque « violation du code » peut constituer un élément justifiant l’exclusion, sans considération de sa gravité. Les dispositions du code devraient être revues afin de garantir que ces offenses mineures ne mènent pas à des sanctions drastiques telles que l’exclusion d’un candidat. Une décision de septembre 2007 de la Cour d’appel de Chisinau, concluant à l’exclusion de candidats pour les élections municipales anticipées des villages de Buteni et de Chirca par la mise en œuvre précisément de l’article 138 du code, illustre bien la nécessité d’introduire un principe de proportionnalité[22].

 

57.  Enfin, les recommandations soulignaient que toute procédure devant conduire à une telle sanction devrait respecter le principe de la présomption d’innocence. Le code devrait également préciser que les décisions de ce type ne devraient pas entraîner l’annulation du mandat d’un candidat élu. Ces recommandations sont réitérées.

 

58.  Le code devrait clairement stipuler que l’annulation ou l’exclusion de candidats d’une liste d’un parti, liste déjà enregistrée et qui avait donc déjà remplie les conditions légales d’enregistrement, ne devrait pas conduire automatiquement à l’annulation de l’enregistrement de l’ensemble de la liste – mesure qui devrait en général être envisagée en dernier ressort dans une société démocratique[23].

 

VIII.      Campagne électorale

Activités de campagne[24]

 

59.  Il n’a pas été répondu aux craintes suscitées par les limitations potentielles du droit à la liberté d’expression aux paragraphes 1 et 12 de l’article 47 du Code. Il faudrait revoir ces paragraphes.

 

60.  Il n’a pas été répondu non plus à la crainte suscitée par l’article 36(1), qui peut être interprété comme limitant les efforts légitimes des organisations internationales de promotion de la démocratie et du pluralisme, comme indiqué au paragraphe 47 du dernier avis conjoint.

 

61.  L’article 47(13) a été modifié afin de préciser que les pouvoirs publics locaux sont tenus de fixer « un nombre minimum de lieux conçus spécialement à des fins électorales ». Cela pourrait limiter les éventuelles interprétations erronées de cette disposition, qui a conduit dans le passé à restreindre les réunions avec les électeurs.

 

62.  L’ajout d’un paragraphe 15 à l’article 47 pour réglementer la publicité sur internet et par les téléphones portables est une tentative de prendre en compte les nouvelles technologies.

Campagne et médias

 

63.  Il n’a pas été remédié aux carences relevées dans les précédents avis conjoints, en particulier le fait que « Les journaux télévisés et les émissions d’actualité de certaines chaînes [aient] consacré des reportages aux activités des candidats sortants ou leur [aient] accordé un temps d’antenne immédiatement avant les élections, de sorte qu’ils paraissaient faire campagne. […] Néanmoins, l’interdiction par l’article 47(4) de tout compte rendu éditorial des meetings électoraux des candidats et des manifestations similaires, sans doute par crainte de privilégier certains concurrents, est une mesure plutôt radicale. Il n’est pas sûr en effet qu’en limitant la couverture médiatique de la campagne aux annonces payantes ou gratuites, on fasse bénéficier le public de la meilleure information sur les différences entre les programmes politiques des candidats »[25].

 

64.  Cette réglementation avantage de façon disproportionnée les candidats sortants dans les médias, ce que confirment les rapports d’observation des élections[26]. Ces recommandations sont réitérées et devraient être prises sérieusement en compte.

 

IX.        Vote et décompte des voix

Sécurité et secret du scrutin

 

65.  Les bulletins de vote porteront désormais le numéro du district électoral et celui du bureau de vote, conformément à un amendement à l’article 49(2). La pratique consistant à tamponner le bulletin au bureau de vote [ancien article 54(5)] a été supprimée par les amendements. Les avis antérieurs critiquaient cette pratique car le tampon était apposé sur le bulletin une fois celui-ci rempli par l’électeur. La nouvelle disposition constitue donc une amélioration. Elle risque cependant de compliquer la logistique d’impression et de distribution des bulletins de vote.

Suspension du scrutin

 

66.  L’article 51 du code a été complété par un paragraphe 11 libellé comme suit : « Aux élections locales, si la procédure de scrutin suspendue en vertu du paragraphe 1 n’a pas repris au bout de 2 heures, le scrutin est considéré comme suspendu pour une période qui n’excède pas deux semaines, et la Commission électorale centrale prend une décision dans les 3 jours sur le jour de reprise du scrutin. La procédure de scrutin reprendra dans les mêmes conditions légales ».

 

67.  La raison d’inclure une disposition de ce type n’apparaît pas de façon évidente. Le code n’énonce pas de conditions spéciales pour lesquelles le vote devrait être suspendu pendant une période prolongée au lieu d’être organisé ailleurs, comme le prescrit l’article 51(1). Il risque d’en résulter une interprétation arbitraire des circonstances et des décisions susceptible d’affecter le scrutin.

 

68.  Il est compréhensible que dans des circonstances particulières le scrutin ne puisse se poursuivre ni même avoir lieu ailleurs, mais ces circonstances devraient être clairement indiquées dans le code et il ne faudrait pas prévoir de clore le scrutin après deux heures de suspension. La commission électorale compétente (ou dans des conditions spéciales une autre autorité compétente) devrait prendre une décision justifiée de prolonger la suspension du scrutin avant ladite suspension et cette décision devrait être susceptible de recours. En outre, les circonstances pouvant conduire à une longue période de suspension du scrutin concernent toutes les élections, et non seulement les élections locales.

Identification des électeurs

 

69.  L’article 53(3) a été modifié de manière à inclure une liste des pièces d’identité valables pour identifier les électeurs. Cette clarification est bienvenue.

Sécurité de la procédure de vote avec urne mobile

 

70.  L’article 55(4) a été complété par la phrase suivante : « Les demandes sont faits deux semaines avant le début des élections jusqu’à 15h00 le jour du scrutin ». Ce point fait référence aux demandes de vote sur le lieu de résidence des personnes qui ne peuvent se rendre au bureau de vote le jour du scrutin pour raisons de santé « ou pour d’autres motifs justifiés ».

 

71.  La date limite et les modalités ajoutées à l’article 55(4) pour la procédure de vote avec urne mobile sont des mesures positives et devraient rendre le processus plus facile à contrôler. Pour renforcer cette mesure de sécurité, il est cependant recommandé que toutes les demandes de vote avec urne mobile soient consignées par écrit avant la date du scrutin. De plus, le nombre de demandes écrites devrait être comparé avec celui des bulletins contenus dans l’urne mobile après ouverture de cette dernière.

Clôture du scrutin

 

72.  Le code électoral fixe les horaires du vote de 7 heures à 21 heures[27]. Toutefois, malgré les recommandations précédentes, les amendements au code n’indiquent pas expressément que les électeurs qui font la queue à l’extérieur des bureaux de vote au moment de la fermeture de ces derniers seront autorisés à voter.

Décompte et recomptage des voix

 

73.  Le nouveau paragraphe 21 ci-après a été ajouté à l’article 60 : « En cas de désaccord avec les résultats préliminaires, avant la validation des résultats par les tribunaux, les candidats aux élections peuvent demander aux tribunaux de recompter les voix ».

 

74.  Ce paragraphe n’indique pas dans quelles conditions une telle demande doit être acceptée. Cela signifie-t-il que toute demande entraîne un recomptage des voix ou la demande doit-elle être justifiée ?

 

75.  L’amendement ne répond qu’en partie aux préoccupations relatives au paragraphe 71 du dernier avis conjoint, dans la mesure où il ne « procède [pas] à une répartition claire des compétences entre les [commissions électorales de districts] et les tribunaux en cas de nouveau dépouillement des voix », et ne précise pas non plus quel organe doit effectuer ce dépouillement.

 

76.  En outre, il était recommandé d’envisager l’obligation pour les commissions électorales de districts concernées de contrôler le dépouillement et de prendre les mesures qui s’imposent en cas de non-concordance du nombre de bulletins, c’est-à-dire de recompter les voix sans avoir à attendre de demande spéciale pour ce faire.

 

77.  Plusieurs recommandations formulées dans l’avis conjoint de 2006 sur les procédures de tabulation et de décompte des voix n’ont pas non plus été prises en compte[28].

 

78.  Les amendements à l’article 62 disposent que tout le matériel électoral, y compris les bulletins invalidés et annulés, doit être conservé au même endroit après les élections, à savoir à la juridiction compétente de la région où est située la commission électorale de district. C’est là un changement positif qui permettra une gestion simplifiée des recomptages après élection.

Publication des résultats

 

79.  Il n’a pas été donné suite à une recommandation faite depuis longtemps selon laquelle « la CEC devrait publier les résultats détaillés des élections, par bureau de vote, sur son site Web dès leur calcul par les [commissions électorales de districts] »[29].

 

80.  De plus, une préoccupation demeure au sujet de l’indication à l’article 61-2 du code selon laquelle les commissions ne devraient pas publier les résultats préliminaires si un recours portant sur la conduite du scrutin a été déposé devant un tribunal. Le code devrait néanmoins contenir des dispositions prévoyant la publication rapide des résultats préliminaires, par les bureaux de vote, afin d’assurer une transparence optimale.

 

81.  D’après le dernier avis conjoint, « la transparence est tout aussi nécessaire, voire plus indispensable encore. En outre, les résultats définitifs peuvent parfaitement tenir compte de l’issue d’une éventuelle procédure judiciaire »[30].

Observateurs

 

82.  Comme indiqué dans le dernier avis conjoint, « Selon l’article 63-1, la commission électorale de district peut refuser une accréditation à un observateur et est tenue d’informer le parti qui l’a désigné des motifs de ce refus. Le Code n’énumère toutefois pas clairement les raisons susceptibles de motiver le refus d’accréditer un observateur ». Cette question n’a pas été abordée dans les amendements[31].

 

83.  De plus, les amendements ne précisaient pas sur quoi devrait s’appuyer la CEC pour décider si un organisme est « capable d’exercer des fonctions civiques durant les élections », comme prévu à l’article 63(4), et se prononcer sur l’accréditation des groupes d’observateurs. L’avis dit une fois de plus que cette exigence semble redondante et risque de créer des restrictions inutiles aux observateurs nationaux. En outre, le code ne définit aucun critère concret et objectif, ni la procédure de prise de décision de la CEC quant aux capacités de l’organisme.

 

 

 

 

X.         Exigences en matière de participation / Seuils de participation des électeurs

 

84.  Malgré la recommandation du dernier avis conjoint et de celui de 2006 soulignant que le seuil de participation pouvait conduire à « des impasses électorales »[32], le code électoral de la Moldova a maintenu la disposition selon laquelle : « [les élections doivent être] invalidées si moins de la moitié des personnes inscrites sur les listes électorales y ont participé »[33].

 

85.  La participation est importante pour la démocratie représentative, mais le fait d’imposer des seuils de participation ne l’’améliore pas nécessairement de façon efficace. De plus est, ces seuils se sont révélés inefficaces et embarrassants dans certains pays récents dans des pays postcommunistes. Ils risquent en fait de contribuer à la fraude pour remporter les élections. La Moldova a elle-même été confrontée à des problèmes liés aux seuils de participation et à des élections manquées dans le cas de l’élection du maire de Chisinau en 2005. Par ailleurs, les seuils de participation peuvent être utilisés abusivement par les forces politiques, qui peuvent influer sur le processus en appelant au boycott.

 

86.  Comme le recommandait déjà les précédents avis conjoints, il faudrait supprimer les seuils obligatoires de participation électorale prévus par les articles 91 et 93. Il en va de même pour les articles 136 sur les élections locales et 171 et 199 sur les référendums, même si les seuils obligatoires sont en l’occurrence plus bas et s’il n’y en a pas pour de nouvelles élections locales. Ayant à l’esprit les problèmes que peuvent causer ces seuils, nombre de pays n’en prévoient pas, même comme conditions préalable à la validité des référendums[34].

 

XI.        Procédures de recours

 

87.  A plusieurs reprises, les précédents avis conjoints ont recommandé de définir clairement les compétences et les responsabilités des diverses instances chargées d’examiner les recours en vue d’éviter les conflits de juridiction et d’empêcher les requérants ou les autorités de choisir leur instance de recours[35], ce qui n’est pas conforme aux dispositions du Code de bonne conduite en matière électorale[36]. Ces recommandations n’ont pas été mises en œuvre de façon satisfaisante.

 

88.  L’article 65(1) a été modifié comme suit : « Les électeurs et les candidats aux élections peuvent contester les actions (ou l’inaction) et les décisions des commissions et conseils électoraux, les actions (ou l’inaction) des candidats dans les organes électoraux dans le respect de la hiérarchie des autorités et juridictions électorales ».

 

89.  Cet amendement ne répond pas totalement aux recommandations ci-dessus, car une simple référence dans cette disposition à la « hiérarchie des autorités et juridictions électorales » ne résoudra pas la question des conflits potentiels de compétence entre tribunaux et commissions électorales. En outre, on ne sait pas clairement si la référence à la hiérarchie du système judiciaire répond aux questions découlant des articles 68, 89 et 92, qui permettent à la fois aux juridictions ordinaires et à la Cour constitutionnelle de déclarer la nullité des résultats.

 

90.  Par ailleurs, comme il est indiqué dans le dernier avis conjoint, « l’article 68-3 du code semble investir les tribunaux d’un pouvoir de modification des procès-verbaux des résultats définitifs lorsque des erreurs sont constatées »[37]. Les amendements n’ont pas clarifié le sens de la phrase suivante : « … [La juridiction compétente] écarte le candidat qui a obtenu un nombre inférieur de suffrages valablement exprimés, pour le remplacer par le candidat ayant obtenu un nombre supérieur de suffrages valablement exprimés, lors de la division séquentielle ». Ce mode de correction semble présenter un caractère excessivement général pour pouvoir s’appliquer à toute erreur éventuelle d’un procès-verbal.

 

91.  L’article 92 dispose : « En cas de constatation par la Cour constitutionnelle d’une infraction aux dispositions du présent Code, commise au cours du scrutin et du décompte des voix, ayant faussé les résultats du scrutin et l’attribution des sièges, les élections sont annulées ». On pourrait interpréter cette disposition comme donnant à la Cour le pouvoir de prononcer l’annulation d’une élection pour l’ensemble du pays, même si l’infraction était limitée à certains bureaux de vote ou districts. Conformément au Code de bonne conduite en matière électorale, de nouvelles élections devraient être organisées là où la commission des infractions a été établie[38]. De plus, s’il doit y avoir de nouvelles élections dans tout le pays, les critères d’invalidation d’une élection peuvent être considérés excessivement sévère.

 

XII.       Sanctions

 

92.  Conformément à l’article 69, toute atteinte à l’honneur et à la dignité des candidats engage la responsabilité juridique de son auteur. L’Avis conjoint de 2006[39] indiquait que cette disposition « [était] trop vague et pourrait être appliqué[e] d’une façon qui entraînerait la violation du droit à la liberté de parole et d’expression. Cette large interdiction pourrait entraîner la violation de l’article 10 de la Convention européenne des Droits de l’Homme, des engagements de l’OSCE et des principes constitutionnels nationaux[40]. Il conviendrait de recommander que l’article 69 soit reformulé de façon à être compatible avec le droit à la liberté de parole et d’expression ».

 

93.  Bien que l’article ne précise pas la sanction applicable, il est une nouvelle fois recommandé de revoir le libellé de la disposition concernée.

 

XIII.      Autres questions

 

94.  L’article 119 a été modifié afin de préciser que le mandat des maires des villes (municipalités), de villages (communes) et des membres des conseils municipaux (villes), communaux (villages) et de districts court dès la validation des résultats du scrutin. C’est là un changement positif qui tient compte de l’éventualité de longs recours après les élections.

 

95.  Bien qu’une nouvelle phrase, à l’article 128, précisant que « la modification des listes électorales se fera dans les conditions du chapitre 80 qui s’appliquera en conséquence » apporte une clarification bienvenue, son insertion dans cet article, qui porte sur les listes électorales, semble inappropriée. Il est recommandé de transférer cette phrase dans une autre partie plus pertinente du code ou dans un nouvel article.

 

96.  La précision à l’article 134 sur l’ordre d’apparition du nom des candidats sur les bulletins de vote au second tour des élections municipales est bienvenue.

 

97.  L’insertion à l’article 138 d’un paragraphe 3 disposant que « De nouvelles élections  sont organisés conformément aux dispositions des chapitres 9 et 10, et considérés comme valables quel que soit le taux de participation aux élections » est une clarification positive.

Conclusion

 

98.  Considérant les modifications que le présent avis recommande d’apporter au code électoral de la Moldova ont un caractère prioritaire, la Commission de Venise et le BIDDH de l’OSCE invitent les autorités à mettre en œuvre toutes les recommandations avant les élections législatives prévues en 2009. En outre, ils invitent les autorités à prendre en considération les autres recommandations importantes formulées dans les précédents avis conjoints.



[1] CDL-AD(2007)040, Avis conjoint du BIDDH de l’OSCE et de la Commission de Venise.

[2] Code électoral (Loi No 1381-XIII du 21 novembre 1997, à la date du 10 avril 2008), CDL(2008)082.

[3] CDL-AD(2007)040, paragraphes 82-84.

[4] Référence au précédent avis conjoint sur le Code électoral de la Moldova adopté à la 66e session plénière de la Commission de Venise (17-18 mars 2006, CDL-AD(2006)001).

[5] CDL-AD(2007)040, début du paragraphe 84.

[6] CDL-AD(2007)040, paragraphe 16.

[7] En outre, voir à cet égard une recommandation similaire de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe dans le document 11374, Respect des obligations et engagements par la Moldova (14 septembre 2007), paragraphes 12, 45 et 46.

[8] CDL-AD(2007)040, paragraphe 63.

[9] La fin de la phrase n’a pas été traduites dans la version du code fournie.

[10] Code de bonne conduite en matière électorale (CDL-AD(2002)023rev), I.1.1., d, v.

[11] Code de bonne conduite en matière électorale (CDL-AD(2002)023rev), I. 1.1., b, paragraphe 6.

[12] Convention européenne sur la nationalité (Strasbourg, 6.XI.1997, STE No. 166), article 17.1.

[13] Premier Protocole à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, tel qu’amendé par le Protocole No. 11 (Paris, 20.III.1952, STE No. 009) ; Article 3 – Droits à des élections libres :

« Les Hautes Parties contractantes s'engagent à organiser, à des intervalles raisonnables, des élections libres au scrutin secret, dans les conditions qui assurent la libre expression de l'opinion du peuple sur le choix du corps législatif ».

[14] Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, telle qu’amendée par le Protocole No. 11 (Rome, 4.XI.1950, STE No. 005), article 14 – Interdiction de discrimination :

« La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ».

[15] Voir  la Convention européenne sur la nationalité (STE 166), précitée.

[16] CDL-AD(2007)040, paragraphe 26.

[17] Recommandation 3 du Rapport final de la mission d’observation électorale du BIDDH de l’OSCE, Élections locales des 3 et 17 juin 2007.

[18] Lors des élections locales du 3 juin 2007, la CEC a mis en œuvre un projet pilote de listes électorales électroniques dans trois bureaux de vote de Chisinau, où les électeurs ayant voté étaient électroniquement répertoriés dans une base de données commune en qualité de votants. Voir à cet égard le rapport final d’observation électorale de l’OSCE/BIDDH, Elections locales des 3 et 17 juin 2007.

[19] CDL-AD(2007)040, par. 31-34.

[20] CDL-AD(2006)001, par. 46-50.

[21] CDL-AD(2007)040, par. 35-43.

[22] La Cour d’appel de Chisinau a jugé le 4 septembre 2007 que deux candidats, qui avaient gagné les élections en juin dans les villages de Buteni et de Chirca, étaient coupables de violation du code électoral et devraient être conséquemment exclus de la course pour les élections anticipées. Ces candidats ont été exclus bien que la CEC avait argué devant les tribunaux que dans les deux cas, il n’y avait pas de preuve convaincante de violations du code and que les violations alléguées par les plaignants étaient de nature mineure.

[23] Voir les lignes directrices du BIDDH de l’OSCE pour la révision d’un cadre juridique pour les élections, pages 20-21, disponible sur http://www.osce.org/odihr/item_11_13588.html.

[24] Pour des références à l’Avis conjoint précédent sur ce point, voir CDL-AD(2007)040, paragraphe 44 à 48.

[25] CDL-AD(2007)040, paragraphe 59.

[26] « Statement of preliminary findings and conclusions », Mission internationale d’observation des élections, élections locales, 3 et 17 juillet 2007 ; disponible sur http://www.osce.org/odihr-elections/23665.html.

[27] Idem, article 50.

[28] Voir CDL-AD(2006)001, paragraphes 51 à 56 sur le dépouillement et 57 à 60 sur la tabulation des résultats ; le dernier avis conjoint référencé CDL-AD(2007)040 met également l’accent sur ces recommandations qui n’ont pas été suivies, paragraphes 70 et 71.

[29] CDL-AD(2007)040, par. 72.

[30] CDL-AD(2007)040, par. 74.

[31] CDL-AD(2007)040, par. 67.

[32] CDL-AD(2006)001, p. 23, par. 15.

[33] Code électoral de la Moldova, article 91.

[34] Code de bonne conduite en matière référendaire recommande de ne pas prévoir de quorums (de participation ou d’approbation) (CDL-AD(2007)008,III.7).

[35] CDL-AD(2007)040, par. 75-79.

[36] Code de bonne conduite en matière électorale, CDL-AD(2002)023rev, par. 97.

[37] CDL-AD(2007)040, par. 78.

[38] CDL-AD(2002)023rev, II.3.3., paragraphe 101 : « Les pouvoirs de l’instance de recours sont également importants. Il doit lui être possible d’annuler le scrutin si une irrégularité a pu influencer le résultat, c’est-à-dire modifier la répartition des sièges. Ce principe général doit être affiné, en ce sens que le contentieux de l’annulation ne doit pas forcément porter sur l’ensemble du territoire, voire l’ensemble de la circonscription ; au contraire, l’annulation doit être possible par bureau de vote. Cela permettra à la fois d’éviter deux situations extrêmes : l’annulation de la totalité d’un scrutin alors que les irrégularités sont limitées géographiquement ; le refus d’annuler le scrutin si l’étendue géographique des irrégularités est insuffisante. L’annulation du scrutin doit entraîner la répétition de l’élection sur le territoire où l’élection a été annulée ».

[39] CDL-AD(2006)001, par. 103.

[40] Voir le paragraphe 9.1 du Document de Copenhague de l’OSCE de 1990 ; le paragraphe 26 du Document de Moscou de l’OSCE de 1991 ; l’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; et les articles 32 et 41 de la Constitution de la Moldova.